Bilan mitigé pour la reproduction du brochet en 2016

Depuis quelques années, la Fédération réalise chaque année en période printanière un suivi de la reproduction du brochet. Pour cela des pêches électriques sont réalisées au sein des frayères à brochet pour vérifier la présence de juvéniles de brochet de l’année.

L’objectif de ce suivi est de suivre l’efficacité des travaux de restauration des frayères à brochet ou d’évaluer la fonctionnalité d’une zone humide pour la reproduction du brochet dans le but de proposer des actions de restauration. Cette étude est réalisée grâce au soutien financier de l’Agence de l’Eau Rhône Méditerranée & Corse et de la Fédération Nationale pour la Pêche en France.

Des conditions thermiques peu favorables en 2016

En 2016, ces inventaires ont été réalisés sur 13 zones humides, 10 frayères aménagées. Les résultats ont été mitigés puisque des juvéniles de brochets ont été observés sur seulement 3 zones humides. Ce résultat s’explique probablement par les températures un peu trop fraiches au cours des  mois de février, mars et avril qui ont sans doute limité la fraie des brochets. En revanche, les conditions hydrologiques ont été au contraire très favorables : les nombreuses crues qui ont eu lieu entre les mois de février et mai sans aucun doute permis l’accès des géniteurs aux frayères, le maintien d’un niveau d’eau dans les zones humide et le retour des alevins au cours d’eau. Ces résultats sont toutefois à interpréter avec précaution car il est possible, qu’avec les crues, les alevins avaient déjà en grande partie rejoint le cours d’eau au moment des inventaires qui ont été réalisés mi-mai.

Les résultats observés cette année ont permis de confirmer la fonctionnalité pour la reproduction du brochet de 3 frayères où des brochetons ont été observés : la baisse du Port D’Ormes (rivière Saône), la zone humide du Pré Des Saules à Cuisery (rivière Seille) et le bras mort du Grand Recard à Marnay (rivière Grosne). Sur les autres sites, les inventaires réalisés en 2016 ne permettent pas de statuer sur leur intérêt pour le brochet.

Juvénile de brochet (crédits photos : Fédération de pêche)

Une étonnante observation : la lote de rivière

Même si ces zones humides sont particulièrement favorables au brochet, elles peuvent aussi  abriter   de nombreuses autres espèces de poissons qui viennent s’y reproduire ou qui profitent d’un lieu abrité pour passer les périodes de crues au calme. C’est le cas de la lote de rivière qui, comme le brochet, se reproduit dans ces zones humides en période hivernale. Les inventaires 2016 nous ont permis d’observer la présence d’un juvénile de lote dans la baisse de l’Argillet à Marnay, zone humide située à proximité de la confluence de la Saône avec la Grosne. Pour diverses raisons (régression des zones humides, prédation par le silure, réchauffement de la température de l’eau, qualité de l’eau, …), cette espèce a quasiment disparue du Val de Saône en Saône-et-Loire : la dernière observation connue datait de 1998 dans la Grosne à Marnay. La capture d’un juvénile de cette espèce constitue donc une surprise même s’il est vrai que cette espèce, qui passe son temps dans les souches d’arbres ou sous de gros blocs, est particulièrement discrète et difficile à pêcher. Espérons que le juvénile observé participe à le reconstitution d’une population plus importante.

Des restaurations de zones humides sur le Solnan et la Grosne

Cette étude a aussi permis de compléter les connaissances piscicoles sur un certain nombre de zones humides situées le long de la Grosne et du Solnan, deux rivières sur lesquelles un programme de restauration des frayères à brochet a été élaboré dans le cadre des Contrats de Rivière Seille et Grosne. Cette étude est donc un préalable à la réalisation de nouveaux projets portés par la Fédération de pêche, les AAPPMA ou encore les syndicats de rivière qui œuvrent à favoriser le retour d’une population naturelle et abondante de brochet sur ces cours d’eau.

Le cycle biologique complexe du brochet

Le  brochet a un cycle biologique complexe. Alors que les jeunes et les adultes vivent dans le lit mineur des cours d’eau, les géniteurs doivent pour se reproduire à la fin de l’hiver migrer vers les zones humides proches des cours d’eau (point bas dans les prés, bras mort, …) : une crue ou une bonne montée des eaux est souvent nécessaire que pour que ces géniteurs puissent atteindre ces zones de frayères ; ils pondent ensuite sur la végétation herbacée qui constitue leur support de ponte puis retournent au cours d’eau. Les zones humides doivent alors rester suffisamment longtemps inondées pour que les œufs puissent éclore et que les juvéniles soient nageant. En général, une durée d’immersion de 45 jours des œufs est obligatoire. Sur certains sites, il est ensuite nécessaire qu’il y ait une nouvelle crue ou une bonne montée des eaux en mai juin pour que les alevins puissent rejoindre le cours d’eau : dans le cas contraire les alevins peuvent mourir dans la zone humide car ce type de milieu peut totalement s’assécher en été.

Les milieux humides dans lequel se reproduit le brochet ont été en grande partie détruits dans le passé pour des besoins liés à l’urbanisation ou à l’agriculture. C’est ce qui explique principalement la régression du brochet en France et c’est pourquoi de nombreux projets de restauration de ces zones sont aujourd’hui proposés dans le cadre des contrats de Rivière.

cycle brochet

Le cycle du brochet (Crédits illustration : UFBAG – SARION PUBLICITE)

Un bras mort en pleine ville à Chatenoy-le-Royal

Lorsqu’on réalise des prospections de terrain, on fait parfois des observations étonnantes. Ainsi, en 2010, dans le cadre de l’étude piscicole de la Thalie, un bras mort aux caractéristiques très intéressantes a été repéré le long de la Thalie en pleine zone commerciale à Chatenoy-le-Royal, juste derrière le Centre Commercial de la Thalie. En général, en milieu urbain, ce type de zone humide a le plus souvent été bouché, d’où notre grande surprise d’observer ici ce type de milieu. Sensibilisé à l’intérêt écologique de ce bras, le Grand Chalon, gestionnaire du site, a procédé en 2013-2014 à un nettoyage (de nombreux déchets jonchaient les berges du bras) et à un entretien de la végétation arborée qui avait eu tendance à trop de développer. L’objectif était de favoriser le développement d’une végétation herbacée humide (petits roseaux).  Cette année, la Fédération de pêche a intégré ce bras mort à son suivi des frayères à brochet pour en évaluer son intérêt piscicole. Même si très peu de poissons ont été observés, cet inventaire sera renouvelé en 2017 pour compléter les connaissances piscicoles sur ce site. Si besoin, un réaménagement de ce bras mort pourra être envisagé en étroite collaboration avec le Grand Chalon.

Bras mort de Chatenoy

Bras mort de Chatenoy